EUNIC Netherlands : Retour sur FAIR P(L)AY #3 organisé à la Dutch Design Week 2023 à Eindhoven 

Contexte

FAIR P(L)AY est un cycle d’événements, initié par EUNIC Netherlands, sur les pratiques équitables dans le secteur culturel, visant à discuter et à mettre en œuvre des moyens nouveaux et existants pour créer des environnements équitables en termes de financement, de rémunération, de droits d’auteur et de mobilité en Europe. 

Il s’agit d’une question politique urgente qui préoccupe les professionnels de la création dans toute l’Europe, car l’événement a eu lieu exactement un jour après qu’un groupe de députés européens a adopté une proposition de cadre européen visant à améliorer les conditions de vie et de travail des professionnels de la culture et de la création. La perception du caractère « aléatoire » des différences entre les pratiques de rémunération au sein de l’Union européenne appelait à une conversation paneuropéenne. 

Comment s’établir en tant que designer ? Qu’est-ce qui fait un designer professionnel ? Comment savoir combien vaut votre travail ? Comment ces questions affectent-elles votre pratique créative ?   

Table ronde

La troisième édition du cycle FAIR P(L)AY d’EUNIC Netherlands a débuté par une discussion entre Mart Veldhuis (illustrateur, Pays-Bas), Wendy Owusu (designer, France), Hanna-Kaarina Heikkilä (designer, Finlande), Branko Popovic (directeur artistique et commissaire d’exposition, Pays-Bas / ex-Yougoslavie) et Lisa Bergman (membre du conseil d’administration du Bundesverband Bildender Künstlerinnen und Künstler, Allemagne) avec Maaike Muis (fondatrice de l’exposition), Pays-Bas / ex-Yougoslavie), et Lisa Bergman (membre du conseil d’administration, Bundesverband Bildender Künstlerinnen und Künstler, Allemagne) avec Maaike Muis (fondatrice et directrice artistique du festival Circusstad, Pays-Bas) comme modératrice. 

La discussion s’est déroulée au cœur du hub créatif Strijp-S, pendant la Dutch Design Week à Eindhoven. La discussion a mis en avant les défis auxquels font face les artistes et designers souhaitant concilier visibilité et juste rémunération de son travail. Des conseils pratiques ont été donnés sur les outils de suivi du temps de travail, les possibilités de s’affilier à un syndicat et la manière de gérer l’équilibre entre les activités artistiques et commerciales, entre autres sujets. Au cours de la discussion, les intervenants et les participants ont eu l’occasion de partager leurs expériences en matière de pratiques équitables dans leurs pays respectifs. 

« Je pense que c’est une excellente chose qu’il s’agisse d’une discussion internationale et que nous représentions différents pays, ce qui nous permet d’opérer sur un terrain international. Je pense que c’est un bon point de départ pour l’Europe et pour une grande discussion sur la façon dont nous faisons les choses. J’ai beaucoup apprécié de partager ces connaissances et d’écouter les histoires. » Hanna-Kaarina Heikkilä (intervenante, Finlande) 

Règles de conduite

Nous avons rassemblé quelques éléments à prendre en compte par tous ceux qui s’intéressent à ce sujet, en particulier les artistes indépendants, mais aussi plus largement les représentants d’écoles d’art et d’institutions et les commissaires d’exposition.  

1. Connaissez votre valeur.

En tant qu’artiste ou designer, vous avez passé des heures à perfectionner votre métier et de nombreux exemples évoqués lors de notre conversation montrent encore que celui-ci n’est pas apprécié en tant que tel – le travail non rémunéré au profit d’un apport en visibilité ou les compensations inférieures au salaire minimum sont monnaie courante en Europe. Il est temps que cela change. 

« Malheureusement, si vous travaillez dans le domaine de la création, vous devez avoir envie de gagner de l’argent. Il faut donc être conscient de ses propres valeurs. Il faut garder à l’esprit qu’il ne s’agit pas d’un loisir, mais d’une profession. Si vous le pratiquez, vous devez en tirer de l’argent pour pouvoir vivre, car le pain et le beurre ne sont pas gratuits. » Hanna-Kaarina Heikkilä (intervenante, Finlande) 

2. Comptez votre temps. 

Réunions, préparations, voyages, nouvelles réunions et retours d’information. Tout cela fait également partie du travail, avant même d’entrer dans le vif du sujet. Vous devez en tenir compte lorsque vous partagez un devis. Différents outils sont disponibles gratuitement, comme Everhour. 

« Si vous travaillez en tant que designer ou artiste, vous oubliez tout le temps que vous y consacrez. Si vous calculez le temps qu’il vous faut pour envoyer des courriels ou voyager, vous créez une meilleure position de négociation pour tout le monde. » Maaike Muis (modératrice) 

3. Briser le tabou et appeler à l’ouverture et à la transparence.

Lors des négociations, ne laissez aucune place à l’opacité ou à l’incompréhension. Dans divers contextes, le sujet de la rémunération a été traité comme un tabou, et ce n’est pas l’artiste qui en bénéficie.

« Je suis heureuse qu’aujourd’hui cette discussion soit ouverte et que les individus soient plus disposés et plus ouverts à en parler, y compris au nom des institutions. Ce qu’il faut retenir, c’est qu’il faut être actif et demander pour trouver sa voie, oser demander et résoudre ses problèmes. » Maaike Muis (modératrice) 

4. Négociez et préparez-vous.

Essayez de trouver une solution gagnant-gagnant, car, dans une situation idéale, ce sont toutes les parties qui sont satisfaites. Et si ce n’est pas le cas, vous pouvez toujours refuser d’entreprendre un projet pour lequel vous seriez mal remboursé. 

« Le conseil que je donne, surtout aux Pays-Bas, c’est de commencer haut ; je pense que c’est la moyenne. Commencer haut, descendre progressivement et se retrouver quelque part au milieu ou, avec un peu de chance, un peu plus haut que le milieu. » Mart Veldhuis (intervenant, Pays-Bas) 

5. Parlez aux anciens élèves des écoles d’art et de design pour écouter leurs expériences.

Leurs réflexions sur la signification de la rémunération équitable sont inestimables et peuvent vous aider à découvrir comment vous pouvez vous-même mettre en place une pratique durable. 

« C’est un grand avantage de pouvoir parler de la carrière d’un designer au cours d’un stage ou avec des diplômés, car on peut leur poser des questions très concrètes, par exemple comment payer ses impôts, s’il est rentable de travailler en free-lance, quels sont les avantages et les inconvénients du travail gratuit. Cela m’a donné une idée plus réaliste de ce qui m’attend après l’école. » Wendy Owusu (intervenante, France) 

6. Syndiquez-vous !

Rejoignez vos pairs au sein d’un syndicat ou d’une association. Vous êtes peut-être un indépendant, mais vous êtes loin d’être seul. En unissant vos forces, vous pouvez améliorer votre position en tant que créateur indépendant et celle de vos pairs. 

« Mon meilleur conseil est de parler aux gens, de parler à des collègues européens, d’aller dans des associations, de s’informer sur les règles de rémunération, il y a beaucoup de choses à trouver pour les designers en quelques clics sur Internet. » Lisa Bergmann (intervenante, Allemagne)  

7. Réfléchir à ce qui est juste dans les projets internationaux.

Cette question n’a pas fait l’objet d’un consensus unanime et mérite d’être approfondie. Est-ce que tous les participants à un projet international sont payés de la même manière, que cette rémunération corresponde ou non aux différents coûts de la vie dans les différents pays ? Que signifie l’équité lorsqu’elle est appliquée à long terme et à l’échelle internationale ? 

« Je suis heureux qu’il s’agisse d’une collaboration internationale, car nous avons besoin de ce genre de conversation. Si nous n’en parlons pas, personne ne sait qu’il y a un problème. Il est plus facile de le faire avec un groupe plus important. » Branko Popovic (Pays-Bas / ex-Yougoslavie) 

Les participants

Au total, il y avait environ 35 participants ; des étudiants et des diplômés dont les travaux étaient exposés lors de la remise des diplômes de la Design Academy Eindhoven, ainsi que des professionnels plus expérimentés et des représentants d’organisations culturelles locales telles que la Dutch Design Foundation, la Stichting Cultuur Eindhoven et la We Are Foundation. Cette combinaison d’instituts et de designers a créé une atmosphère très dynamique, avec une participation active  du public qui a posé des questions et partagé ses expériences personnelles en matière de pratiques équitables. Beaucoup ont indiqué qu’il s’agissait d’un sujet important dans le domaine du design et ont apprécié les conseils qu’ils ont reçus, par exemple un outil de suivi du temps qui permet d’estimer avec précision les coûts qu’un projet spécifique pourrait encourir. 

« J’ai l’impression que beaucoup de choses ont été exprimées, des choses que la plupart des professionnels créatifs ont en tête, mais qu’ils ne peuvent pas vraiment saisir. Je suis généralement très intéressée par les moyens d’aider les travailleurs créatifs : Je viens d’obtenir un financement pour la première fois de ma vie par l’intermédiaire du conseil des étudiants de mon université, je suis donc enthousiaste et motivée à l’idée de voir ce que je peux accomplir grâce à cela et quelles autres opportunités se présenteront à moi. » Un étudiant participant 

Des conseils concrets et des ressources pour mieux connaître votre valeur

Vous ne savez pas par où commencer pour déterminer ce qui constitue un bon tarif pour votre travail ? Consultez ces sites web :  

• Rekentool: cao-loon naar zzp-tarief | digiPACCT 
• Fair pay – Kunstenbond 
• Fair Practice Code | Gedragscode voor de culturele en creatieve sector 
• Zelf het tarief bepalen | Fair Practice Code 

Si vous êtes designer, vérifiez si le programme Driving Dutch Design est fait pour vous. Vous pouvez vous inscrire jusqu’au 26 novembre. Pour toute question, veuillez contacter Katja Lucas : Driving Dutch Design 

EUNIC Netherlands souhaite remercier la modératrice Maaike Muis et notre panel de cinq artistes. Nous apprécions grandement votre franchise et votre motivation à travailler pour un secteur plus juste, plus équitable et plus durable. 

Remerciements

Nous tenons à remercier tout particulièrement la Dutch Design Foundation et notre partenaire d’accueil, Foundation We Are. Le groupe de travail EUNIC Netherlands pour FAIR P(L)AY est composé de : DutchCulture, Goethe-Institut Netherlands, Institut français NL, Finnish Cultural Institute for Benelux, Ambassade d’Autriche aux Pays-Bas, Czech Centre Netherlands, Vlaams Cultuurhuis de Brakke Grond. Cet événement a été rendu possible grâce au soutien du EUNIC Global Cluster Fund et de la Commission européenne.